Ayant eu le bonheur de suivre mon premier cours universitaire avec Pierre Audy en 1986 sur les enfants en difficulté d’adaptation et d’apprentissage, j’ai été touchée par la grandeur d’âme de cet homme pour qui la situation des enfants en difficulté était une préoccupation très présente. Ce dernier avait une façon très humaine de nous amener à avoir un esprit critique face à cette réalité humaine. Il avait réussi à me sensibiliser à ces enfants qui ont tant besoin de compréhension et surtout d’amour. Quelques années plus tard, je poursuivais mes études et mon premier cours fut API, soit actualisation de son potentiel intellectuel qui met la dimension affective et sociale au cœur du perfectionnement des stratégies cognitives. L'API inclut d'ailleurs dans son programme tout autant les stratégies de résolution de problèmes que des principes de vie basés sur le contrôle des émotions. Ce cours nous amenait également à faire une réflexion sur la manière de faire apprendre ses enfants en difficulté et coïncidence, mon premier cours pour un retour à l’université était réalisé par le regretté Pierre Audy. Mes premières expériences avec des enfants en difficulté d’apprentissage m’ont permis de constater différentes situations qui m’ont amené à me poser des questions sur le sujet. En effet, alors que l’ensemble du milieu éducatif vise à rassembler les élèves en difficulté dans une classe dite régulière, nous rappelant que nous sommes tous égaux au nom des droits de l’homme, considérant que tous puissent étudier ensemble, dans un climat de tolérance, où les différences sont acceptées. Ce n’est pas vraiment le constat que j’ai fait.
En effet, j’ai vite constaté en travaillant avec des enfants différents que ceux-ci refusent de travailler pour ne pas montrer à leurs pairs qu’ils ne sont pas intellectuellement capables d’exécuter la tâche. Ils ont honte de leur capacité intellectuelle. Je me souviendrai toujours de la réflexion d’un enfant ayant des troubles d’apprentissage qui refusait de travailler carrément si bien que nous aurions pu le juger comme lâche, mais connaissant ces deux parents, je ne pouvais croire à cette hypothèse, je cherchais donc pourquoi il ne voulait pas travailler et j’ai découvert qu’il aimait mieux être considéré comme lâche, indiscipliné etc , que de montrer sa difficulté d'apprentissage aux autres. Un bon matin que je leur expliquais que les cerveaux ne fonctionnaient pas tous de la même manière et que nous allions essayer de trouver des méthodes de travail pour les aider à découvrir une manière d’apprendre propre à chacun, mon petit garçon m’a dit comme s’il m’annonçait qu’il avait une maladie honteuse : « J’ai des problèmes d’apprentissage et je n’arrive pas à savoir comment apprendre ». Les yeux baissés, triste devant ses pairs de m’avoir avoué sa réalité, il avait presqu’envie de pleurer. Je ne vous cache pas que cet aveu est venu me chercher au niveau émotif. Aujourd’hui, ce dernier est au secondaire, et sa mère me raconte qu’il arrive heureux à la maison comme jamais il ne l’a été au primaire. Il était pourtant intégré dans une classe dite « régulière » pour une meilleure socialisation disait-on … Il rejoignait un groupe de jeunes qui comme lui avait des difficultés d’apprentissage quelques heures par jour, mais il était avec la classe dite régulière pour le reste du temps. Sa mère constate qu’il est beaucoup plus heureux aujourd’hui avec des jeunes de son âge ayant des difficultés similaires aux siennes. Il n’est pas continuellement confronté avec l’écart qui le sépare de ses pairs. Au contraire, il côtoie des jeunes avec les mêmes difficultés que lui, et des jeunes académiquement rendus au même endroit que lui.
Comment peut se sentir un jeune intégré dans une classe de sixième année, alors que lui n’est qu’en deuxième année académiquement? Les explications pour des tâches complexes sont synonymes de vouloir comprendre le chinois pour nous. Je comprends presque leur désir d’être dérangeant, et d’avoir des troubles de comportement dans ces conditions de différences avec leurs pairs. Deux chercheurs de l’Université du Québec à Montréal dénoncent «l’inclusion à tout prix», qui à leurs yeux ne pourrait exister que dans un «monde idéal». Une «utopie» bien loin de notre réalité, selon eux. L’applicabilité d'une approche préconisant que tous les enfants, quelles que soient leurs difficultés, soient inclus dans les classes ordinaires. «Il y a quelque chose de très positif dans la philosophie de l'inclusion totale, c'est de donner une chance à chacun, dit Gérald Boutin. On est d'accord avec ça, mais pas au point de mettre certains enfants à l'écart des services spécialisés dont ils ont besoin.» Selon lui, l'intégration ne peut se faire qu'à certaines conditions et ne doit pas entraîner la disparition de toutes les classes spéciales. «L’inclusion de tous les enfants présentant des besoins particuliers dans les écoles ordinaires n’est pas réaliste», affirment Gérald Boutin et Lise Bessette, auteurs du livre intitulé Inclusion ou Illusion. Et tout comme eux, je crois qu’il faut diriger ces enfants avec des groupes qui leur ressemblent et ainsi renforcer leur estime de soi. Naturellement, ils peuvent intégrer d’autres groupes dans des matières où la différence ne sera pas notable pour tous. Je pense à l’éducation physique, qui souvent ne pose aucun problème pour un enfant en difficulté d'apprentissage.
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En effet, j’ai vite constaté en travaillant avec des enfants différents que ceux-ci refusent de travailler pour ne pas montrer à leurs pairs qu’ils ne sont pas intellectuellement capables d’exécuter la tâche. Ils ont honte de leur capacité intellectuelle. Je me souviendrai toujours de la réflexion d’un enfant ayant des troubles d’apprentissage qui refusait de travailler carrément si bien que nous aurions pu le juger comme lâche, mais connaissant ces deux parents, je ne pouvais croire à cette hypothèse, je cherchais donc pourquoi il ne voulait pas travailler et j’ai découvert qu’il aimait mieux être considéré comme lâche, indiscipliné etc , que de montrer sa difficulté d'apprentissage aux autres. Un bon matin que je leur expliquais que les cerveaux ne fonctionnaient pas tous de la même manière et que nous allions essayer de trouver des méthodes de travail pour les aider à découvrir une manière d’apprendre propre à chacun, mon petit garçon m’a dit comme s’il m’annonçait qu’il avait une maladie honteuse : « J’ai des problèmes d’apprentissage et je n’arrive pas à savoir comment apprendre ». Les yeux baissés, triste devant ses pairs de m’avoir avoué sa réalité, il avait presqu’envie de pleurer. Je ne vous cache pas que cet aveu est venu me chercher au niveau émotif. Aujourd’hui, ce dernier est au secondaire, et sa mère me raconte qu’il arrive heureux à la maison comme jamais il ne l’a été au primaire. Il était pourtant intégré dans une classe dite « régulière » pour une meilleure socialisation disait-on … Il rejoignait un groupe de jeunes qui comme lui avait des difficultés d’apprentissage quelques heures par jour, mais il était avec la classe dite régulière pour le reste du temps. Sa mère constate qu’il est beaucoup plus heureux aujourd’hui avec des jeunes de son âge ayant des difficultés similaires aux siennes. Il n’est pas continuellement confronté avec l’écart qui le sépare de ses pairs. Au contraire, il côtoie des jeunes avec les mêmes difficultés que lui, et des jeunes académiquement rendus au même endroit que lui.
Comment peut se sentir un jeune intégré dans une classe de sixième année, alors que lui n’est qu’en deuxième année académiquement? Les explications pour des tâches complexes sont synonymes de vouloir comprendre le chinois pour nous. Je comprends presque leur désir d’être dérangeant, et d’avoir des troubles de comportement dans ces conditions de différences avec leurs pairs. Deux chercheurs de l’Université du Québec à Montréal dénoncent «l’inclusion à tout prix», qui à leurs yeux ne pourrait exister que dans un «monde idéal». Une «utopie» bien loin de notre réalité, selon eux. L’applicabilité d'une approche préconisant que tous les enfants, quelles que soient leurs difficultés, soient inclus dans les classes ordinaires. «Il y a quelque chose de très positif dans la philosophie de l'inclusion totale, c'est de donner une chance à chacun, dit Gérald Boutin. On est d'accord avec ça, mais pas au point de mettre certains enfants à l'écart des services spécialisés dont ils ont besoin.» Selon lui, l'intégration ne peut se faire qu'à certaines conditions et ne doit pas entraîner la disparition de toutes les classes spéciales. «L’inclusion de tous les enfants présentant des besoins particuliers dans les écoles ordinaires n’est pas réaliste», affirment Gérald Boutin et Lise Bessette, auteurs du livre intitulé Inclusion ou Illusion. Et tout comme eux, je crois qu’il faut diriger ces enfants avec des groupes qui leur ressemblent et ainsi renforcer leur estime de soi. Naturellement, ils peuvent intégrer d’autres groupes dans des matières où la différence ne sera pas notable pour tous. Je pense à l’éducation physique, qui souvent ne pose aucun problème pour un enfant en difficulté d'apprentissage.
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Intégrer ou pas? C'est un sujet "à la mode", mais d'une complexité très grande. Tu amènes un beau témoignage, mais je crois que chaque élève en difficulté a une situation différente.
RépondreSupprimerJe t'avais parlé d'un billet de Mario Asselin sur le sujet. Tu pourras enrichir ta réflexion ici: http://carnets.opossum.ca/mario/archives/2007/11/lintegration_sc.html.
Je suis cependant d'accord avec toi d'éviter d'intégrer à tout prix les élèves en difficulté.
J'ai moi aussi des doutes à ce sujet. Ce qui est déplorable dans la situation actuelle, c'est qu'on est en train de faire de l'intégration "sauvage" au détriment du bien-être de tous. Des élèves qui, au départ, ne présentent qu'une simple difficulté d'apprentissage peuvent rapidement se transformer en élèves avec des troubles de comportements dans une classe dite "régulière", car il n'y a en effet rien de pire pour un élève que d'avouer son incapacité à réaliser une tâche. Ce n'est pas de la mauvaise volonté, c'est instinctif: c'est une flèche en plein coeur de l'égo et de l'amour-propre et personne ne veut vivre ça. L'intégration doit passer par la "concertation". Concertation entre l'élève, l'équipe-école et les parents.
RépondreSupprimerLors de mon dernier contrat, deux mois après le début de l'année scolaire, j'ai fini par apprendre de la part d'un collègue que 12 de mes élèves étaient des élèves "intégrés" dans ma classe mais qu'ils suivaient le reste de leur formation en classe "adaptée". Heureusement, il a pris le temps de me faire un "topo" de leurs forces et de leurs difficultés. Toutefois, cela ne relevait pas de tout de son travail à lui. C'est une énorme lacune au niveau de l'organisation scolaire. Les dossiers ne suivent pas du primaire au secondaire et on ne songe même pas à avertir les nouveaux enseignants de la situation particulière de certains élèves. C'est une aberration. Comment peut-on faire de la différenciation avec ces élèves si on croit qu'il s'agit de troubles du comportement ?
En ce qui me concerne, je me demande si placer un élève en difficulté dans un groupe d'élève avec des troubles d'apprentissage n'a pas le même impact en terme de connotation que si l'on intègre ces élèves dans des classes régulières. J'entends, par là, que faire partie d'un groupe ne réduit pas l'étiquetage de faiblesse ou de force. Lorsqu'un élève se fait dire qu'il sera placé dans un groupe de CPC ou de TC, il connait très bien l'image qu'il aura auprès de ses paires. Il en est d emême pour un élève qui est accepté dans une école privée et bien réputée; celui-ci sera bien conscient de ce que signifie ce changement,
RépondreSupprimerDeux autres membres de ma famille sont dyslexiques comme moi. L'une s'est fait placer en CPC et a décroché, l'autre a décroché avant d'y être placé. Moi, on m'a gardé au régulier et je suis la seule qui a terminé son secondaire. Mais je n'insinue pas que l'intégration est une meilleure solution. Les arguments mentionnés plus haut par Chantal et Julie sont très valables et je suis tout à fait d'accord.
Ce que je cherche à exprimer, c'est que la solution n'est pas dans l'intégration ou non d'un élève en difficulté d'apprentissage. Il faut chercher ailleurs. Dans un cas ou dans l'autre, ce qui est déficient, c'est plutôt le manque de sensibilisation sur les troubles d’apprentissage. Un élève qui ne se sent pas compris ou étiqueté ne pourra jamais développer d'intérêt pour l'école et un élève sans intérêt ne peut être qu'un doué pour s'en sortir. C’est là que la sensibilisation entre en jeu. Si les élèves et les enseignants connaissaient le fonctionnement du cerveau, comme Chantal l’a expliqué à l’élève, les préjugés se réduiraient et l’importance de la réussite se transformerait en importance de la méthode d’apprentissage.
Peut-être que je n'ai pas la solution idéale, mais je suis convaincue de ne pas me tromper quant à l'orientation pour trouver une solution.
Pour ma part, je suis contre l'intégration des élèves en difficulté d'apprentissage de même que des élèves à mobilité réduite (handicapés). Bien que j'ai vécu une très belle expérience d'intégration lors de mon premier stage, je crois que le concept est effectivement utopique. Ces élèves ont besoin d'une aide spécialisée que l'enseignant ne peut offrir alors qu'il doit enseigner à 25 élèves. De plus, on ne se cachera pas que les enfants peuvent être cruels et ne savent pas que les mots peuvent blesser sérieusement. Même avec une bonne gestion de classe, il est difficile de gérer ce qui se passe à l'extérieur de celle-ci. Prendre position sur ce sujet est délicat. Si les élèves "normaux" ne sont pas sensibilisés par les différences au moyen de l'intégration, seront-ils plus compréhensifs?
RépondreSupprimerLors de mon premier stage en cinquième année du primaire, une belle petite cocotte est arrivée en région et a été intégrée dans la classe. Sa mère était une escorte et la petite présentait un grand retard de développement. Elle avait le potentiel d'un enfant de deuxième année. L'enseignant devait constamment lui donner des exercices différents des autres parce qu'elle ne pouvait réaliser les mêmes que ses camarades de classe. L'enseignant avait par contre une très bonne gestion de classe qui a permis à l'élève de bien s'intégrer au sein du groupe. Mais sa place n'était pas dans cette classe parce qu'il devenait difficile pour elle de progresser là où des élèves avaient trois ans d'avance en terme d'apprentissages. De plus, l'enseignant ne pouvait pas lui fournir l'aide nécesssaire pour qu'elle chemine.
Bref, oui, il faut sensibiliser davantage les élèves aux différences et les informer sur le fonctionnement des troubles pour qu'ils soient plus compréhensifs sur le sujet. Pour ce qui est des élèves en difficulté d'apprentissage, la solution serait, selon moi, qu'ils soient placés dans des classes spécialisées ou intégrés dans des classes régulières avec des spécialistes à leur disposition. Malheureusement, nous manquons de spécialistes dans les écoles. Que faire alors?